Dans les pas des terres de la Barossa

Avant l’arrivée des colons européens, les tribus aborigènes des Peramangk, Ngadjuri et Kaurna se partageaient les terres de la Barossa. L’histoire de la région a basculé dans les années 1830 avec la création de l’État d’Australie-Méridionale. Au cours de cette période, des travaux de recherches ont été menés par la South Australian Company pour analyser la fertilité des sols de la région. Les premières analyses se sont avérées particulièrement concluantes et ont incité des fermiers prussiens et britanniques à s’installer dans la Barossa.

L’agriculture locale s’est développée de façon impressionnante et les premiers vignobles sont apparus dans la région au cours des années 1840. Certains des plus grands domaines viticoles actuels (Jacob’s Creek, Seppeltsfield, Yalumba) ont commencé à produire du vin grâce à des pieds de vigne importés d’Allemagne et de France. Les plantations de Cabernet-Sauvignon, Grenache, Mourvèdre, Riesling, Sémillon et Shiraz ont connu une croissance importante pendant plusieurs décennies.

L’effondrement de la consommation de vins tranquilles à l’orée du XXe siècle a poussé les vignerons de la Barossa à produire des vins fortifiés. La région s’est vite imposée comme une référence en la matière en fournissant la majeure partie de l’Empire Britannique.

Il a ensuite fallu attendre plus de 50 ans pour voir réapparaître des vins tranquilles dans la région. À partir de ce moment, un vigneron australien nommé Colin Gramp a tenté de mettre en œuvre les techniques de vinification observées lors de son passage dans le vignoble de la Napa Valley (Californie). Ses travaux ont permis d’obtenir des vins à la fois concentrés, intenses et fortement boisés. 

À partir de la fin des années 1980, d’importants investissements ont été réalisés pour développer les infrastructures des propriétés viticoles de la région. Cela a permis d’améliorer considérablement la qualité des vins et les Shiraz de la Barossa se sont imposées sur l’ensemble des marchés internationaux. 

Depuis une dizaine d’années, les vignerons font évoluer leurs méthodes de vinification pour s’adapter au réchauffement climatique et aux nouvelles tendances de consommation. En parallèle, un programme nommé Barossa Old Vine Charter a été mis en place pour préserver les plus vieilles parcelles de vignes de la région.

Barossa
Parcelle de Grenache datant du XIXème siècle

Le centre névralgique de la viticulture australienne

La région viticole de Barossa est située à 70 kilomètres au nord-est d’Adélaïde dans l’État d’Australie-Méridionale. Elle se compose de 14 000 hectares de vignes et possède la plus grande plantation pré-phylloxérique du monde (250 hectares sont âgés de plus de 100 ans). Les 900 propriétés viticoles de l’indication géographique de la Barossa sont réparties dans deux sous-régions aux caractéristiques bien distinctes : la Barossa Valley et l’Eden Valley. 

La Barossa Valley, capitale mondiale de la Shiraz

La première d’entre-elles bénéficie d’un climat méditerranéen qui se caractérise par des étés chauds et secs, un ensoleillement important et un faible niveau de précipitation (220 millimètres en moyenne au cours du cycle végétatif). Cela contraint les vignerons à irriguer pour réduire l’impact de la sécheresse. Ils doivent aussi adapter la taille de la vigne pour offrir davantage d’ombre aux raisins et diminuer les risques de brûlures. La plupart d’entre eux optent également pour une densité de plantation particulièrement faible (moins de 4 000 pieds à l’hectare) afin de limiter la concurrence pour l’accès à l’eau.

Les parcelles de vignes se composent généralement de sols argileux ou sablonneux qui sont à la fois profonds, riches en minéraux et peu fertiles. L’altitude oscille quant à elle entre 130 et 430 mètres, mais toutes les parcelles bénéficient d’une amplitude thermique importante entre le jour et la nuit. Cela permet d’obtenir des vins avec une maturation optimale et une fraîcheur plus importante. Pour autant, ce phénomène ne permet pas d’obtenir des vins suffisamment équilibrés et les vignerons se retrouvent contraints d’ajouter de l’acide tartrique pour diminuer l’échelle de PH et augmenter l’acidité du vin.

L’encépagement de la Barossa Valley se compose d’une très large majorité de variétés rouges (90%), on retrouve principalement de la Syrah (67%) et du Cabernet-Sauvignon (14%). Ces vins sont généralement consommés sur le marché australien, mais la part des exportations est conséquente (environ 30 %). Les principaux marchés étrangers des vins de la Barossa Valley sont les Etats-Unis et le Royaume-Uni.

Barossa Valley
Vue d’ensemble sur la Barossa Valley

L’Eden Valley, une perle au coeur de la Barossa

L’Eden Valley bénéficie quant à elle d’un climat nettement plus frais que la Barossa Valley grâce à l’altitude. Les vignobles sont situés entre 310 et 540 mètres au-dessus du niveau de la mer. Ainsi, la région bénéficie d’une amplitude thermique supérieure à celle de la Barossa Valley. De plus, les températures journalières sont nettement plus fraîches au cours des semaines qui précèdent les vendanges. Cela permet de ralentir la maturité technologique des raisins et d’obtenir des vins plus frais avec une acidité naturellement élevée. L’échelle de PH est généralement inférieure à 3,5 au moment de la récolte, les vignerons n’ont donc pas besoin de procéder à des corrections.

Les parcelles de vigne de l’Eden Valley se composent majoritairement de sols rocheux et peu profonds qui favorisent la rétention d’eau. Pour autant, le faible niveau de précipitation au cours du cycle végétatif (230 millimètres en moyenne) contraint les vignerons à irriguer pour limiter les phases de stress hydrique qui peuvent entraîner l’arrêt de la photosynthèse. 

Tout comme dans la Barossa Valley, les vignerons doivent adapter la taille pour limiter les risques de brûlure des raisins au cours de l’été. Les vignes sont généralement palissées d’une manière particulière. Au lieu d’être attachée, l’extrémité des rameaux retombe afin de créer une ombre protectrice.

L’encépagement de l’Eden Valley comprend presque autant de plantations de cépages blancs (47%) que de cépages rouges (53%). On retrouve principalement de la Shiraz (35%), du Riesling (22%), du Cabernet-Sauvignon (13%) et du Chardonnay (10%). En 2021, seulement 11% de la production a été exportée, les principaux marchés sont le Royaume-Uni (36%), la Chine (16%) et les États-Unis (13%).

La Barossa en quête de fraîcheur et d’élégance

La Shiraz, reine de la Barossa Valley

La Shiraz de la Barossa Valley est récoltée de plus en plus tôt, désormais, la vendange se déroule généralement à partir de la mi-février. Les baies sont petites et possèdent une peau épaisse et très foncée. Cela permet d’obtenir des vins particulièrement concentrés, très tanniques avec une robe intense.

Dans sa jeunesse, la Shiraz de la Barossa Valley présente donc une couleur pourpre et développe de puissants arômes de fruits noirs (cassis, cerise noire, myrtille) au nez. On retrouve également des notes épicées (poivre blanc, réglisse) et herbacées (eucalyptus, humus, menthe).

Depuis quelques années, les vignerons privilégient le chêne français et réduisent la part de barriques neuves au cours de l’élevage. Certains utilisent également des formats plus grands (barriques de 300 à 500 litres, foudres) afin de limiter l’apport de notes boisées et d’obtenir des vins plus élégants. Dans ce cas, les vins offrent de fines notes chocolatées, fumées et vanillées. 

En vieillissant, la Shiraz Barossa Valley développe un large bouquet d’arômes tertiaires (champignon, cuir, gibier, sous-bois, tabac, terre) et sa couleur tire vers le grenat. Ses tannins puissants s’assouplissent et deviennent particulièrement agréables. 

C’est un vin avec un corps charpenté qui possède un degré d’alcool compris entre 14,5% et 15,5%. Les corrections réalisées par les vignerons permettent d’obtenir des vins avec un niveau d’acidité élevé. Pour les meilleurs vins de la région, le potentiel de vieillissement peut dépasser les 20 ans.

shiraz Barossa
Shiraz du millésime 2022 de chez Thorn-Clarke

Le roi de l’Alsace au cœur de l’Eden Valley

Le Riesling d’Eden Valley est généralement vendangé à partir de la mi-mars lorsque les vignerons souhaitent produire un vin blanc sec. Certains préfèrent le laisser quelques semaines de plus sur pied pour voir son taux de sucre augmenter. C’est un cépage qui peut produire des niveaux de douceur différents tout en conservant sa forte acidité naturelle.

Le Riesling d’Eden Valley arbore une robe pâle jaune citron et développe de puissants arômes d’agrumes (citron, citron vert, pamplemousse) et de fruits verts (poire, pomme) au nez. Il présente également une grande minéralité.

Afin de conserver son caractère aromatique, les vignerons optent pour une vinification à basse température et un élevage dans un contenant inerte (béton, acier inoxydable). En vieillissant, le Riesling d’Eden Valley développe des notes d’amande, de marmelade et de miel. On retrouve également des saveurs pétrolées typiques du cépage.

C’est un vin qui possède un potentiel de garde impressionnant (supérieur à 10 ans), une acidité élevée et un niveau d’alcool faible (11% à 13,5%).

Guide des millésimes

Barossa Valley

Millésime20162017201820192020
Vins blancs78777
Vins rouges87998

Eden Valley

Millésime20162017201820192020
Vins blancs910998
Vins rouges87997
Source : Halliday Wine Companion 2022: The Bestselling and Definitive Guide to Australian Wine, 2022, p. 57-58.

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