En route vers les sommets de la viticulture mondiale
L’histoire de la viticulture bolivienne est intimement liée au département de Tarija. C’est dans cette zone que les conquistadors espagnols ont planté les premiers ceps de vigne à la fin du XVIe siècle. Malheureusement, le développement de la viticulture a été ralenti dans cette région par plusieurs épidémies de peste. Il a fallu attendre le milieu du XVIIIe siècle pour que le vignoble commence réellement à se structurer. À partir de cette époque, les producteurs de la Vallée Centrale de Tarija sont devenus les principaux fournisseurs des 250 000 habitants de la citée minière de Potosi.
De la fin du XVIIIe jusqu’au milieu du XXe siècle, la viticulture bolivienne n’a pas connu d’avancées significatives. La première phase de modernisation a eu lieu à Tarija dans les années 1960. Les plus grosses fortunes de l’industrie viticole locale ont fait importer de nouvelles technologies en provenance d’Argentine. Parallèlement, c’est à cette époque que Don Julio Kohlberg a fait naître le premier domaine viticole industriel dans la Vallée Centrale de Tarija. À la fin de la décennie suivante, des cépages nobles ont été plantés dans la région pour tenter d’améliorer la qualité de la production.
Malheureusement, la croissance de la viticulture bolivienne a été ralentie au début des années 1980 par l’accumulation des maladies dans les vignobles. Pour endiguer ce phénomène, le gouvernement s’est allié avec les principaux acteurs de l’industrie viticole pour faire naître le Centre national de recherche sur la viticulture et l’oenologie (CENAVIT). Dans le même temps, l’université de Tarija a été missionnée pour réaliser des travaux de recherche sur la viticulture de haute altitude.
Au début des années 2000, les plus grands domaines de la Vallée de Tarija ont commencé à exporter leur vin. Pour répondre aux standards des marchés internationaux, ils se sont entourés des meilleurs oenologues du continent sud-américain. En parallèle, des investissements colossaux ont été réalisés pour importer de nouvelles variétés, moderniser les infrastructures de vinification et restructurer les vignobles.

Le défi d’un vignoble de haute altitude
La Vallée Centrale de Tarija est une région viticole située au niveau du 21e parallèle Sud. Elle génère 90 % de la production nationale. De ce fait, on la considère comme la capitale de la viticulture bolivienne. Son vignoble est niché au cœur de la cordillère des Andes à une altitude comprise entre 1 600 et 2 200 mètres. Il bénéficie d’un climat semi-aride qui est tempéré par une forte amplitude thermique diurne et des vents qui descendent des montagnes dans l’après-midi. Cela permet d’obtenir un parfait équilibre entre l’acidité et la sucrosité dans les baies.
Bien que les conditions soient relativement favorables à la viticulture dans la Vallée Centrale de Tarija, les producteurs doivent s’adapter à la topographie morcelée du relief et à l’érosion des sols. Cela rend la mécanisation impossible dans la plupart du vignoble. Par conséquent, les travaux de la vigne doivent être effectués par les hommes ou les animaux. Les deux autres inconvénients majeurs sont la forte radiation UV (4 fois supérieure à celle de Bordeaux) et la concentration des épisodes pluvieux à la fin du cycle végétatif.
Pour s’adapter aux contraintes précédemment évoquées, les producteurs doivent recourir à l’irrigation tout au long du printemps et au début de l’été pour éviter que les vignes ne souffrent d’un stress hydrique trop important. Parallèlement, ils doivent adopter une conduite du vignoble qui permette de protéger les raisins des rayons du soleil tout en laissant circuler suffisamment d’air pour limiter la propagation des maladies cryptogamiques. Pour autant, lorsque la pression sanitaire est trop forte, certains vignerons utilisent des produits de traitement.
Comme l’ensemble des régions viticoles boliviennes, l’encépagement de la Vallée Centrale de Tarija est dominé par le Muscat d’Alexandrie. Cette variété est utilisée pour produire le Singani depuis près de 500 ans. Désormais, cette eau-de-vie de vin est exportée dans le monde entier. On retrouve ensuite de nombreux cépages : le Cabernet Sauvignon, le Chardonnay, le Malbec, la Syrah, le Tannat ou encore L’Ugni Blanc. Certains vins de la région sont présents sur les marchés internationaux. Pour autant, cela ne représente qu’une part infime de la production.

Le Malbec a traversé la frontière avec brio
Ces dernières années, le Malbec a traversé la frontière nord de l’Argentine pour s’installer au sud de la Bolivie dans la Vallée Centrale de Tarija. Ce cépage à maturation tardive trouve les conditions nécessaires à son épanouissement dans cette région viticole. Bien que l’ensoleillement quotidien soit inférieur à ce que l’on rencontre en Argentine, il reste suffisamment important pour offrir des conditions de maturation optimales. En revanche, les épisodes pluvieux qui surviennent à la fin du cycle végétatif entraînent une forte baisse de rendement. La sensibilité du Malbec à la pourriture grise et au mildiou obligent les vignerons à faire preuve d’une grande vigilance.
Dans sa jeunesse, le Malbec de la Vallée Centrale de Tarija présente une couleur pourpre et développe de puissants arômes de fruits noirs (cerise noire, groseille, prune bleue). On retrouve également des notes florales (violette) et herbacées (eucalyptus, menthe). Les lots les plus qualitatifs sont élevés en fût de chêne pendant 12 à 18 mois afin d’obtenir des saveurs épicées. Après plusieurs années en bouteille, ce cépage offre un large bouquet d’arômes tertiaires (cuir, sous-bois, tabac) et sa couleur tire vers le grenat.
Généralement, le Malbec de la Vallée Centrale de Tarija permet d’obtenir des vins avec un corps charpenté, des tannins puissants et un degré d’alcool compris entre 14% et 15%. Grâce aux nuits fraîches provoquées par l’altitude, les baies conservent une acidité particulièrement élevée. Par conséquent, les oenologues n’ont pas besoin de corriger l’échelle de pH des jus. Pour les meilleurs vins de la région, le potentiel de vieillissement peut dépasser les 10 ans.
Guide des millésimes de la Vallée Centrale de Tarija
Millésime | 2018 | 2019 | 2020 | 2021 | 2022 |
Vins tranquilles | 8 | 8 | 8 | 7 | 5 |
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