Argentine

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L’histoire du vignoble argentin 

Dans les pas des conquistadors

L’histoire de la viticulture argentine a débuté au XVIe siècle avec l’arrivée des conquistadors. En 1551, un moine nommé Juan Cidrón aurait planté le premier pied de vigne à proximité de la ville de Santiago del Estero. À cette époque, l’objectif des jésuites était de produire du vin pour la messe. Le surplus de raisins servait à nourrir les soldats espagnols qui devaient traverser la Cordillère des Andes à pied. Jusqu’à l’expulsion des jésuites en 1767, l’essentiel de la production était situé à proximité des monastères. L’encépagement se composait majoritairement de variétés originaires d’Espagne. À la fin du XVIIIe siècle, le vignoble s’est réorganisé à proximité de la ville de Mendoza.

À la suite de sa déclaration d’indépendance survenue en 1816, l’Argentine a connu une grave période d’instabilité politique. Après avoir définitivement repoussé les Espagnols, les Argentins ont dû faire face à une guerre civile. En 1829, un militaire nommé Juan Manuel de Rosas a tenté de rétablir l’ordre en installant un régime autoritaire. Les nombreuses tentatives d’invasion étrangère lui ont permis d’imposer un système totalitaire de 1833 à 1853.

Dès la chute de la dictature de Juan Manuel de Rosas, les argentins ont établi la constitution qui a donné naissance à la république d’Argentine en 1853. À partir de cette date, des efforts considérables ont été mis en place pour favoriser le développement de l’industrie viticole. Dans les années 1850, Domingo Faustino Sarmiento (président de l’Argentine de 1868-1874) réussit à convaincre le gouverneur de Mendoza d’engager l’agronome bordelais Michel Aimé Pouget. En plus d’importer de nouveaux cépages européens, ce dernier a fondé un institut de recherches et une école d’agronomie à Mendoza.

Les travaux menés par Pouget ont permis de moderniser la viticulture argentine. Le Malbec s’est rapidement imposé comme le cépage le mieux adapté aux terroirs locaux. Cette variété offre la possibilité d’obtenir des rendements élevés sans pour autant perdre en qualité. En près de 20 ans, la surface du vignoble argentin est passée de 2 000 à 10 000 hectares. En parallèle, le gouvernement a fait construire une voie ferrée reliant Mendoza à Buenos Aires pour favoriser la commercialisation des vins à l’échelle nationale.

 

Parc national de Los Cardones dans la province de Salta

Parc national de Los Cardones dans la province de Salta

 

Vers les sommets de la viticulture mondiale

Au début du XXe siècle, le vignoble argentin a poursuivi son ascension en s’appuyant sur l’exemple des méthodes utilisées à Bordeaux. Les densités de plantation et méthodes de taille ont été reproduites à l’identique pour tenter d’obtenir une meilleure qualité de raisins. En parallèle, des expérimentations ont été menées dans d’autres zones situées à plus haute altitude.

Malgré une instabilité économique, politique et sociale, le vignoble argentin a connu une croissance continue jusqu’au milieu des années 1960. À partir de ce moment, des gouvernements autoritaires se sont succédé à la tête du pays et l’économie s’est refermée sur elle-même. Pour autant, la production viticole n’a cessé de croître, car les vignerons se sont concentrés uniquement sur les variétés peu qualitatives à fort rendement. Cet épisode de surproduction a entraîné une chute sans précédent de l’industrie viticole argentine.

Après avoir connu un passage à vide de plus de 20 ans, le vignoble argentin a relevé la tête au début des années 1990. La mise en place d’une politique de contrôle des volumes et la libéralisation de l’économie ont permis un redémarrage de l’industrie viticole. En parallèle, l’incorporation de nouvelles techniques viticoles a permis de moderniser le style des vins.

Au début des années 2000, les critiques ont commencé à s’intéresser aux vins argentins et la dévaluation de la monnaie locale a porté les exportations. Les efforts mis en place par le gouvernement et les nouvelles tendances de marché ont incité les producteurs à s’orienter vers un mode de production plus respectueux de l’environnement. Dans le même temps, des investissements colossaux ont été réalisés pour développer l’industrie oenotouristique.

 

Quartier de Puerto Madero à Buenos Aires

Quartier de Puerto Madero à Buenos Aires

 

La viticulture argentine en chiffres

Le vignoble argentin se trouve, pour l’essentiel, à proximité de la Cordillère des Andes. Il s’étend sur plus de 1500 kilomètres, de la province de Salta au nord jusqu’à celles du Rio Negro et de Neuquén au sud. Les 211 000 hectares de vignes permettent de produire chaque année près de 11,5 millions d’hectolitres. Cela fait de l’Argentine le 2e producteur d’Amérique du Sud et le 7e à l’échelle mondiale. En moyenne, 26 % de cette production est exportée, ce qui permet à l’Argentine d’occuper le 6e rang mondial des exportations en volume et le 10e en valeur.

L’encépagement est dominé par les variétés destinées à l’élaboration des vins rouges (58%). On retrouve notamment le Malbec (20%), le Bonarda (9,2%), le Cabernet Sauvignon (7,4%) et la Syrah (6,2%). Depuis quelques années, la part des cépages blancs est en recul (19%). Seuls le Torrontés (5,1%) et le Chardonnay (3%) arrivent à tirer leur épingle du jeu. Une variété nommée Criolla Grande occupe 24% de l’encépagement national. Ses caractéristiques organoleptiques en font une variété peu qualitative que l’on ne peut catégoriser comme blanche ou rouge.

De manière générale, le vignoble argentin se compose d’oasis situées au milieu de terres désertiques. Sans l’apport en eau des nappes souterraines et des rivières descendant des montagnes, la viticulture serait impraticable. Depuis la fin des années 1990, d’importants investissements ont été réalisés pour trouver une alternative à l’irrigation par submersion. Désormais, la plupart des exploitations viticoles utilisent un système goutte à goutte pour préserver les ressources en eau et diminuer leur coût de production.

Une grande partie du vignoble argentin est située entre le 25e et le 35e parallèle Sud. Pour contrer les effets de cette proximité avec l’équateur, les producteurs ont été contraints de planter leurs vignes en altitude (600 à 3 000 mètres). Cela permet d’obtenir une amplitude thermique diurne, particulièrement importante. Ainsi, les nuits fraîches ralentissent la diminution des arômes et de l’acidité des raisins pendant la phase de maturation. Cette viticulture à haute altitude engendre deux risques majeurs : la grêle au cours de l’été et la gelée au printemps et à l’automne. Pour protéger les raisins de la grêle, des filets sont positionnés au-dessus des vignes. En ce qui concerne la gelée, les producteurs peuvent utiliser des asperseurs, des brasseurs d’air ou des réchauds.

En parallèle, une gestion spécifique doit être mise en place pour que la conduite du vignoble s’adapte au climat. On retrouve généralement une densité de plantation faible à moyenne (4 500 et 6 000 pieds à l’hectare) pour limiter la concurrence à l’accès à l’eau. Les vignerons doivent également être vigilants à la gestion de la canopée pour protéger les raisins des risques de brûlures. La plupart d’entre eux optent pour un palissage vertical adapté de façon à ce que l’extrémité des rameaux retombe pour créer une ombre protectrice.

 

Vignoble de la province de Mendoza

Vignoble de la province de Mendoza

 

Les principales zones de production

Province de Salta

Au nord du pays, on retrouve la Province de Salta et ses vignobles de haute altitude. Les zones de production sont situées entre 1 500 et 3 100 mètres au-dessus du niveau de la mer. Elles sont encerclées par un paysage montagneux qui génère une ombre pluviométrique sur les parcelles situées en contrebas. Cela protège les vignes des épisodes pluvieux et maximise leur ensoleillement. En parallèle, l’air venu des montagnes engendre une fraîcheur suffisamment importante pour ralentir la maturation durant la nuit. Les variétés les mieux adaptées à ce climat extrême sont le Cabernet Sauvignon, le Malbec et le Torrontés.

Provinces de la Rioja et de San Juan

À plusieurs centaines de kilomètres au sud de la Province de Salta, on retrouve celle de la Rioja. Les zones de production sont situées à une altitude comprise entre 700 et 1800 mètres au-dessus du niveau de la mer. La majeure partie du vignoble se trouve dans la Vallée de Famatina, où l’irrigation permet d’obtenir des rendements très importants. La production se compose majoritairement de vin blanc bon marché élaboré à partir de Torrontés.

Encerclée par la Province de la Rioja au nord et celle de Mendoza au sud, la Province de San Juan concentre près de 17 % de la superficie du vignoble argentin. Les zones de production sont situées à une altitude comprise entre 500 et 2 000 mètres. Depuis quelques années, certaines propriétés arrivent à produire des vins rouges de grande qualité à partir de Cabernet Sauvignon, Malbec et Syrah. Pour autant, la majeure partie de la production est destinée à l’élaboration de vins rosés bon marché.

Province de Mendoza

Le centre névralgique du vignoble argentin est situé à proximité de la ville de Mendoza. Les cinq zones de la province génèrent à elles seules près de 70 % de la production nationale. Au nord et au sud, la majeure partie des domaines viticoles s’attelle à élaborer des vins rouges bon marché. La zone située au centre de la Province de Mendoza est reconnue mondialement pour sa production de Malbec ronds et souples aux arômes d’épices douces. Les vins les plus prestigieux sont élaborés sur les contreforts des Andes (entre 900 et 1 100 mètres d’altitude) dans le département de Lujan de Cuyo au sud-ouest de la ville.

À l’est de Mendoza, le département de Maipu produit des Cabernet Sauvignon et des Syrah de grande qualité. Les meilleurs raisins proviennent généralement des parcelles les plus en altitude (jusqu’à 800 mètres). La cinquième zone de la province est la Vallée d’Uco. Elle est située à quelques dizaines de kilomètres au sud-ouest de Mendoza et produit des Malbec de renommée internationale. L’altitude (900 à 1 500 mètres) accentue l’influence rafraîchissante de la cordillère des Andes. Cela permet d’obtenir des vins rouges qui allient des arômes de fruits frais et des notes florales.

Provinces de Neuquén et du Rio Negro

À proximité du 40e parallèle sud, le vignoble patagonien se décompose en deux provinces : Neuquén et Rio Negro. Contrairement aux autres régions viticoles argentines, leur climat n’est pas tempéré par l’altitude (150 à 450 mètres) mais par la latitude. L’alliance entre ensoleillement quotidien et nuits fraîches permet d’obtenir un style de vins que l’on ne retrouve nulle part ailleurs en Amérique du Sud. Les cépages dominant en Patagonie sont le Malbec, le Pinot Noir et le Chardonnay.

 

Vignoble situé à Cafayate dans la Province de Salta

Vignoble situé à Cafayate dans la Province de Salta